
Florent Huille : « En matière de parité, je suis assez optimiste »
L’équipe du Réseau Parité Un Une est allée à sa rencontre pour en apprendre davantage sur le regard qu’il porte sur la question de la parité en entreprise et des freins qui empêchent les femmes d’accéder à de hautes fonctions.
Bonjour Florent, quelle vision avez-vous des femmes dirigeantes et de la parité ?
J’ai commencé à nourrir ma propre réflexion sur la parité quand j’ai rejoint le groupe La Poste et que j’ai travaillé dans l’entreprise Mediapost. À l’époque, j’étais directeur général adjoint aux côtés d’une femme, elle-même PDG. Elle avait un discours très articulé et argumenté sur la parité. J’ai cherché à mieux comprendre son engagement. Au début, je me disais qu’en matière de parité, les choses étaient en train de changer très rapidement, que l’affaire serait vite réglée. Mais à son contact et en parlant autour de moi j’ai compris que ce n’était pas si simple. Pour que les lignes bougent sur cette question, il faut adopter une politique très volontariste.
À votre avis, faut-il aller jusqu’aux quotas dans les Comex et pour se faire, recruter plus de femmes ?
J’observe au sein de notre groupe que dans certaines directions, l’équilibre femmes/hommes est là et que dans d’autres, non. Il semble nécessaire de mettre en place certaines règles car à se donner trop de temps, les avancées sont plus difficiles à obtenir. La parité est malheureusement un processus lent, même si les quotas, bien que pouvant être perçus comme un peu brutaux, ont permis de l’accélérer, par le recrutement notamment. Pour se donner les chances de faire les choses bien et de manière pérenne, préparer les générations, repérer les talents et les faire monter, c’est essentiel. Il n’existe pas de baguette magique de la parité. Il est important de garder le cap en veillant à ce que les viviers se remplissent partout et à tous les niveaux.
D’après vos observations, quels sont les freins empêchant les femmes d’accéder à de hautes fonctions ?
Il faut du temps pour changer les mentalités, la culture et accompagner les transformations. Mais pour moi, une des clés pourrait être de trouver un meilleur équilibre général des temps de vie personnels et professionnels. Les amplitudes horaires professionnelles sont le plus souvent difficilement compatibles avec une vie familiale véritablement équilibrée. Malheureusement dans un couple quand les deux sont très engagés sur le plan professionnel, les carrières se paient parfois cher en terme d’équilibre familial, en particulier pour les enfants. Il serait donc bénéfique de changer de paradigme et d’avoir une vision raisonnée du travail pour réussir à ne pas sacrifier des moments de vie importants. Un couple ne devrait pas avoir à choisir entre la carrière de l’un ou de l’autre pour s’occuper d’un ou plusieurs enfants. Le congé paternité est en ce sens une belle avancée. On peut également espérer que le télétravail va permettre grâce au gain de temps sur les transports, une meilleure répartition des temps de vie et donc des rôles de chacun.
Pour vous, que représente le Réseau Parité Un Une ?
Ce Réseau Parité est d’une grande importance car il porte haut et fort un sujet d’intérêt général. Il serait d’ailleurs utile et bénéfique que le discours sur la parité soit le fait de tous, et en particulier des hommes, afin de créer de l’émulation, des débats en entreprise pouvant être créateurs de valeur. Si ce sont systématiquement les mêmes personnes qui sont identifiées sur ces sujets, le risque est qu’elles ne soient plus écoutées. Avoir une Direction des ressources humaines impliquée sur le sujet de la parité ne suffit pas. La parité c’est l’affaire de tous et en tant que manager, nous avons une responsabilité d’exemplarité et de vigilance car la partie se joue aussi dans notre posture et dans l’image que nous renvoyons aux équipes. Ainsi par exemple, à la fin d’une réunion, une mauvaise blague ou un petit mot maladroit peuvent avoir un effet dévastateur sur la posture de chacun en laissant à entendre que la parité est un sujet peu important et utile pour l’entreprise. Il est donc essentiel d’insuffler la bonne dynamique, d’être attentif à tous les signaux en interne et surtout de vérifier concrètement chaque année que des progrès sont réalisés. Il en va de la santé économique de l’entreprise. Les études montrent régulièrement que les entreprises sont mieux gérées quand la parité est respectée au sein de leur comité de direction. Nul doute qu’il y a encore beaucoup à faire, que nous sommes qu’au début du changement, mais je reste optimiste, on avance.