Sandrine Pierrot : « quand je suis arrivée à La Poste, les femmes étaient des hommes comme les autres»

Sandrine Pierrot est Directrice exécutive Banque Réseau au sein de La Poste depuis janvier 2018. Elle a notamment fondé l’École de La Banque et du Réseau en 2014. A travers cet échange, elle partage avec le Réseau Parité Un Une sa vision de la parité, qui a évolué au fil de ses expériences, avant et depuis son arrivée à La Poste. Au sein du Groupe, elle joue le rôle d’exemple, ne se contentant pas de donner des directives pro-mixité.

Racontez-moi votre parcours avant et depuis votre arrivée à La Poste… et en tant que femme. 

Je suis arrivée au sein du Groupe La Poste il y a 25 ans, après une première expérience professionnelle de 3 ans dans une banque italienne. Au fil du temps, j’ai gravi les échelons, jusqu’à devenir Directrice Exécutive Banque Réseau. Mes débuts à La Poste n’avaient strictement rien à voir avec mon premier emploi à la banque. Il y a 25 ans, la culture y était très différente vis-à-vis des postes que peuvent tenir des hommes et des femmes : là où j’avais peu de perspective d’évolution à la banque, tout du moins en France, la parité était presque un non-sujet à La Poste !

A l’époque, les femmes étaient « des hommes comme les autres », qui pouvaient progresser de la même manière que leurs homologues, à ce détail près que si l’on voulait faire sa carrière au sein du Groupe, il fallait accepter une certaine mobilité géographique d’ampleur pour avoir une promotion. Me concernant, la première fois que l’on m’a fait une telle offre, c’était en 2008, pour un poste de directrice régionale… à 800km de chez moi, alors que mes enfants étaient âgés de 5, 8 et 11 ans. Je n’ai pas pu accepter cette proposition, en tant que mère de famille et ayant un mari en profession libérale pas mobile du tout… À ce moment-là, j’ai même failli quitter La Poste. J’ai finalement fini par exprimer que ce n’était pas acceptable pour moi : pour que je puisse mener ce poste et faire face aux responsabilités confiées, il fallait me garantir un certain équilibre professionnel et personnel, absolument pas envisageable de la sorte. Grâce à des dirigeants et dirigeantes qui m’ont fait confiance, j’ai quand même pu évoluer : trois ans plus tard, en 2011, le directeur du réseau de l’époque m’a proposé la direction de la région qui se trouvait à 200km de chez moi, dans le Var, proposition que j’ai pu accepter. En disant les choses, j’espère avoir contribué à ce que les choses évoluent à La Poste.

 

Justement, est-ce que vous étiez déjà engagée en faveur de la mixité avant votre arrivée au sein du Groupe La Poste, ou est-ce que cet engagement s’est développé au fil du temps ? 

Je pense que j’étais moins engagée au tout début de ma carrière, notamment lorsque je travaillais au sein de cette banque italienne : je ne pensais même pas que je pouvais changer quoi que ce soit, tellement le sexisme y était présent! J’avais une réflexion à chaque fois que je mettais un pantalon… et d’ailleurs, à La Poste je n’ai plus jamais mis de jupe. Je pense même que c’est grâce à mes pantalons qu’on me reconnaît !

Si j’ai pu agir en faveur de la parité dans le groupe, c’est d’abord parce que l’entreprise qui m’emploie a rendu cela possible. Je n’aurais pas pu mener le même combat à la banque, à l’époque.

 

Comment agissez-vous en faveur de cette parité au sein du Groupe… ? 

Il y a « dire les choses », et il y a aussi « montrer l’exemple ». En 2014, j’étais toujours directrice régionale. Le directeur du réseau et le président de la Banque Postale de l’époque m’ont proposé de créer l’Ecole de la Banque et du Réseau, alors que mes enfants étaient encore jeunes. J’ai accepté cette offre, à condition d’un jour de télétravail par semaine, ce qui était rare à l’époque, d’autant plus comme membre du Comex du réseau !

Ce que je veux, c’est participer à montrer que malheureusement, une femme ne peut pas être considérée comme un homme pour tout un tas de raisons, notamment « à cause » de la charge familiale qui lui incombe, quoi qu’il arrive, avec la maternité. Alors, je milite pour que les femmes puissent avoir un parcours de carrière qui prenne cela en compte, et pour qu’elles soient promues et visibles.

Par exemple, je ne suis pas forcément pour les quotas, mais je pense que nous sommes obligés de passer par là pour vraiment inciter les grands groupes à avoir une vraie réflexion sur les manières d’organiser et d’anticiper les parcours et carrières des futures femmes dirigeantes. En d’autres mots, je prêche la bonne parole, et « j’utilise » ma position pour montrer que c’est possible, déjà au niveau de « la petite France », le surnom donné au Groupe, qui a quand même plus de 250 000 salariés et salariées à son actif !

 

… et au-delà ? 

Au-delà de La Poste, je représente aussi le groupe La Poste au sein de la Chaire Femmes et Science de l’Université de Dauphine : si on veut la parité dans les grandes entreprises françaises, les Comex et les Codir, il nous faut plus de femmes scientifiques ! J’interviens donc dans les choix des projets financés par la Chaire, qui servent à comprendre les raisons des disparités pour pouvoir les supprimer. Les sciences dures font partie de beaucoup de nos branches et métiers à La Poste, comme la branche numérique, les systèmes d’information, l’industrie de pointe liée à la logistique et aux transports, l’assurance et la banque, … Ce qu’on souhaite, c’est rendre ces carrières visibles et montrer qu’il n’y a pas que des métiers de techniciens experts et que les sciences dures amènent à autre chose, justement.

Heureusement, cela évolue : j’ai eu la chance d’accompagner ​Nathalie Collin, Directrice générale de la Branche Grand public et numérique du Groupe à Grenoble pour rencontrer les collaborateurs et collaboratrices de nos filiales numériques et IA (Probayes, Open Value), et j’ai été très agréablement surprise de voir qu’il y avait plein de jeunes femmes.

 

Pourquoi pensez-vous que la parité est nécessaire en entreprise ? 

Tout simplement parce que de nombreuses études l’ont démontré… ! Par exemple, les 6 gestionnaires d’actifs, dont LBPAM, regroupés au sein du « 30% club France investor group » soutiennent une approche volontariste en engageant les représentants des entreprises dans lesquelles ils investissent à des discussions sur la question de la diversité des équipes de direction, et à avoir au moins 30% de femmes dans les instances de direction, après s’être reposés sur des études qui prouvent que la performance des entreprises s’améliore au-delà de ce seuil…

Que dire de plus ? Peut-être que c’est un bon début… mais qu’il faudra aller plus loin que les 30% ! Aussi, il n’y a pas que le sujet du genre dans la mixité : celle-ci doit aller au-delà de la parité, en matière de profils – par exemple vis-à-vis de la discrimination par la formation, l’âge, l’origine, etc. Il y a du boulot !

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